Gauche anticapitaliste
Courant unitaire pour l’écosocialisme
Contribution suite aux assises pour l’écosocialisme
Le
Parti de Gauche a pris l’initiative d’organiser des Assises pour
l’écosocialisme et soumis dans ce cadre un projet de manifeste. La Gauche Anticapitaliste ,
courant unitaire pour l’écosocialisme, a jugé cette initiative intéressante, très
positive, et a accepté d’y participer : outre une intervention d’une de
nos porte-parole lors des assises, notre courant est co-organisateur, dans
certaines villes, d’assises locales prolongeant la réunion nationale de début
décembre 2012 à Paris. Le processus engagé doit se poursuivre tout au long de
l’année 2013 pour se conclure sur de nouvelles assises nationales en décembre
prochain. La Gauche Anticapitaliste manifeste sa disponibilité pour la
co-organisation de cette deuxième édition.
La
GA se félicite que de plus en plus de forces se rejoignent pour défendre un
projet global de société, alternatif au capitalisme, tournant le dos à
l'impasse productiviste et tirant les leçons du désastre que fut le stalinisme.
Un projet global que nous nous accordons à nommer désormais l'écosocialisme.
Celles et ceux qui se battent contre le capitalisme ont besoin d'un horizon
post-capitaliste, d'une espérance, pour donner un sens à la nécessaire
transformation révolutionnaire de la société.
Un
projet de manifeste a été soumis à la discussion par le Parti de Gauche. Ce
texte contient de nombreux points avec lesquels nous sommes en accord. Nous
voudrions ici insister sur les sujets de débat, non pour entretenir une
polémique ou des différenciations factices, mais pour chercher à avancer
ensemble dans l’énoncé de notre projet commun de société et des formes
potentielles de la transformation envisagée. Sans doute un certain nombre des
points de débat que nous soulevons renvoie à des habitudes différentes de
formulation, liées à une culture politique qui sur certains points n’est pas la
même. La discussion devrait alors permettre de lever certaines
incompréhensions. Sur d’autres points, apparaissent des désaccords dont il
convient de vérifier la réalité et la portée. Dans la mesure où ce document a
l’ambition de dégager une perspective stratégique de transformation sociale, il
convient de prendre le temps de la discussion, et ne pas précipiter son
adoption, s’il s’agit qu’il puisse être signé assez largement.
La
perspective de révolution citoyenne telle qu’elle est exposée ne prend pas
suffisamment en compte certains aspects, pour nous décisifs. Si tabler sur une
victoire électorale d’un bloc de forces écosocialistes est une des hypothèses
stratégiques à envisager, encore faut-il insister sur le fait que cette
victoire ne pourra être que le premier acte d’une bataille sans merci avec les
forces politiques et sociales hostiles à toute perspective de transformation
sociale et écologique. La résistance des classes dominantes serait immédiate,
et s’appuierait sur des moyens considérables : financiers, économiques,
bureaucratiques… et probablement militaires également. Elle ne serait pas
simplement l’œuvre du seul capital financier, mais aussi du capital industriel
ainsi que d’une bonne partie de l’appareil d’Etat et des médias. On voit
clairement d’ailleurs à l’œuvre les effets puissants de cette résistance
aujourd’hui dans plusieurs pays d’Amérique du Sud ayant porté à leur tête des
gouvernements anti-impérialistes. Il ne s’agit pas pour nous de dire qu’il
existe une solution simple à ce problème mais de l’identifier clairement pour
préparer la rupture à accomplir. Il s’agit encore moins de laisser entendre
qu’on pourrait faire l’impasse sur la nécessaire adhésion démocratique d’une large
majorité de la population au processus engagé. Il ne s’agit pas non plus de
croire ou de laisser croire que tout peut-être fait en un jour ou en claquant
des doigts indépendamment de l’évolution des rapports de force et de la
maturation de la conscience populaire.
Dans
ce cadre, plusieurs points fondamentaux doivent à notre avis être mis en
évidence clairement : le fait d’associer perspective de mobilisation
autonome des classes populaires et perspective gouvernementale, la nécessaire
rupture avec l’Etat actuel, une perspective anticapitaliste posant la question
de la propriété des grands moyens de production et d’échanges, sans laquelle il
ne saurait y avoir d’écosocialisme, et s’appuyant sur l’autoorganisation
populaire. Sur ces trois éléments notamment, le texte ne nous semble pas
satisfaisant. Reprenons-les brièvement.
Un
gouvernement, même légitimement élu, qui entendrait commencer à œuvrer résolument
pour les classes populaires et engager par conséquent une transformation
sociale et écologique se heurterait à la résistance acharnée des classes
dominantes (dénigrement et harcèlement des grands médias privés, fuite des
capitaux, résistance d’une grande partie des hauts fonctionnaires, voire
actions factieuses d’une partie des corps répressifs et de l’armée, etc.). Il
est donc essentiel que son arrivée au pouvoir soit le résultat d’une puissante
mobilisation populaire, qui sera ensuite indispensable pour vaincre les
résistances mais aussi pour commencer à changer les choses en profondeur. La
réorganisation du système productif et des services publics ne peut être
simplement décrétée d’en haut mais doit résulter de l’immixtion des usagers et
des travailleurs dans la gestion des unités de travail. La question de la
propriété est ici décisive : il nous paraît illusoire de penser qu’une
planification écologique puisse être mise en place afin d’organiser et
programmer la transformation sociale et écologique sans que les grands moyens
de la production et d’échanges passent sous contrôle populaire, et donc que le
pouvoir non seulement du capital financier mais aussi du capital industriel,
d’ailleurs étroitement enchevêtrés, soit sérieusement rabotés. Ce contrôle
populaire doit selon nous prendre la forme d’une appropriation publique et
sociale, aux niveaux local, national voire continental suivant les cas. Pour
nous, cette appropriation sociale et populaire doit être pensée comme réponse
aux dérives et échecs des nationalisations passées (EDF, banques…), elle
devrait articuler :
-
Appropriation publique car les grands choix de
production de biens et de services relèvent de la délibération collective des
citoyen-nes, et ne peuvent donc pas être otages des intérêts privés. Mais cela
n’est pas suffisant, d’où les 2 points suivants.
-
Appropriation sociale car la gestion des unités
de production doit relever des travailleurs/euses associé-es de ces unités sous
le contrôle des usager-es, et conformément aux décisions collectivement
délibérées,
-
Caractère populaire de cette appropriation car
il ne peut s’agir d’un processus figé aux règles édictées par les
administrations d’Etat et qui deviendrait alors rapidement un alibi à une
planification bureaucratique.
Ceci
n’implique ni une socialisation complète de l’économie, ni une suppression de
la régulation par le marché de toutes les sphères de l’activité économique,
mais revient simplement à donner les moyens au peuple de prendre et contrôler effectivement
les grands choix économiques, écologiques et sociaux. Une socialisation totale
de certains secteurs stratégiques sera cependant incontournable : énergie,
transports, production pharmaceutique… Sera également nécessaire un encadrement
étroit et une mise sous contrôle des citoyens et producteurs associés
concernant des secteurs comme la construction/l’habitat, la grande distribution
et l’agro alimentaire.
Enfin,
l’Etat indispensable à la transition vers l’écosocialisme ne peut être l’Etat
actuel, avec lequel une rupture profonde est nécessaire. Il peut suffire pour
s’en convaincre, par exemple, de citer le rôle bien spécifique en France d’un
certain nombre de grands corps (Mines, Ponts, ENA, Polytechnique…), au cœur de
l’imbrication étroite entre pouvoir administratif et pouvoir industriel et
financier, et par ailleurs souvent actifs promoteurs d’un productivisme résolu.
Il nous semble en effet contreproductif d’entretenir l’illusion d’un appareil
d’Etat docile et discipliné, qui pourrait être mis au service de notre projet
écosocialiste comme il l’est aujourd’hui du modèle capitaliste.
D’autre
part, difficile de ne pas évoquer la nécessité de rompre avec l’armée de métier
actuelle, largement indépendante aujourd’hui de tout contrôle populaire. Le
poids considérable des dépenses militaires, la nécessité de sortir du nucléaire
militaire, non du seul nucléaire civil, ou encore de construire un outil de
défense au service des citoyen-nes et
non des visées des classes dominantes, sont des aspects essentiels d’une
transformation sociale et écologique. On pourrait citer bien d’autres exemples.
D’autres
questions seraient à approfondir (quelle république ?, quelle
laïcité ?, quelle école publique ?, quelle agriculture ?, quelle
place pour les « experts » et la recherche scientifique ?, quel
contrôle citoyen des applications scientifiques ? etc.), mais nous
voulions dans cette première contribution soulever ce qui nous semble être des
points durs de la discussion nécessaire. Un certain nombre de formules du texte
peuvent aller dans le sens des remarques formulées, mais à d’autres endroits et
dans son économie générale, des désaccords apparaissent. Nous souhaitons donc continuer
cet échange.
Au-delà
de ces remarques, il nous semble important qu’une décision soit prise pour
savoir si la cadre des assises est étendue au-delà du seul Parti de Gauche avec
la volonté d’associer toutes les forces intéressées, et de chercher à parvenir
à la rédaction d’un texte final où l’ensemble des parties prenantes pourrait se
reconnaître de manière satisfaisante. Dans une telle perspective, il nous
semble évident que les délais de rédaction devraient être allongés et qu’une
version collective ne peut être envisagée avant le 2nd semestre
2013.
Le
Collectif d’Animation de la Gauche Anticapitaliste
3
janvier 2013
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